Lundi
après-midi, 14 février.
Est-il
nécessaire de conseiller aux visiteurs dont les narines sont très sensibles, à
ceux qui ont l'esprit d'un inspecteur du travail de ne pas aller visiter ce
quartier ?
Pour ceux
qui restent, c'est une expérience plus qu'intéressante, mais à faire en apnée !
Nous
arrivons en même temps qu'une charrette de peaux de petite taille.
Les
ateliers de tannages sont en plein air, derrière des murs qui séparent chaque
entreprise. Surprise derrière la première porte franche : ce sont des cuves de
béton toutes neuves qui sont là, bien différentes des images traditionnelles.
Des
rigolles d'évacuation entre les rangées de bassin, de l'eau claire, pas âme
qui vive.
L'état
aide les tanneurs à refaire leurs installations, pour diminuer la pollution
causée par leur activité, et améliorer les conditions de travail des ouvriers.
35 à 40
litres d'eau sont nécessaires pour traiter 1 kilo de peau. Les effluents
liquides générés sont constitués de mélanges de matières biogéniques (poils,
lipides, protéïnes des peaux) et de produits chimiques (chaux, acide
sulfurique, sel marin, sels minéraux, excréments de pigeon qui dégagent de
l'ammonique, chrome, tannins végétaux tels que les écorces de mimosa, de chênes
liège, le son, la farine et la liste doit être incomplète ...) La collecte et
le traitement de tous ces déchets est un problème immense. Il semble que ceux
des déchets solides soient maintenant organisés. On continue
?
Voici un
atelier en activité ! qui traite des peaux de grandes dimensions. Sûrement des
chameaux ou des bovins, spécialité des tanneurs berbères. Les chèvres et les
moutons sont celle des tanneurs arabes.
Dans un
atelier un chef nous fait monter sur une terrasse où l'air est un peu plus
respirable, et la vue plus générale. Ici les peaux, après avoir été triées et
classées sont ouvertes. Elles seront ensuite débarassées des poils, des graisses,
des restes de chair avec un couteau. Puis séjournerons pendant un mois dans des
bassins, avec de l'eau, de la chaux vive, ou des excréments de
pigeons au cours duquel elles seront foulées et retournées. L'ouvrier a des
cuissardes pour le protéger de tous ces produits agressifs, mais il préfère ne
pas mettre ses gants ...
Elles sont
changées de bassin tous les 12 jours, et au terme du mois de traitement elles
sont mises à sécher sur les murs qui entourent les bassins,
Il me
semble que le grattage auquel nous avons assisté pour enlever les derniers
déchets avec un grand racloir arrondi était une opération terminale, car les
peaux suspendues derrière l'ouvrier ont l'air au point pour être transformées
en objet de cuir fin.
Nous
n'avons pas vu de bassins de coloration, il parait que la tendance est aux
cuirs naturels.
Toutefois
les pigments naturels que nous aurions pu voir auraient été :
du rouge à
base de coquelicot, de garance ou de cochenille,
de
l'orange à base de henné,
du marron
à base de bois de cèfre,
du bleu à
partir de la pierre d'indigo ou de cobalt,
du vert à
base de menthe sauvage,
du jaune à
partir de safran ou d'écorce de grenade,
du beige à
partir de son de blé,
et du noir
à partir de l'antimoine.
Mais les
colorants chimiques sont arrivées jusqu'à Marrakech.
Nous
sommes suivis par un rabatteur depuis que nous sommes arrivés dans le quartier
bien que Zohra lui ait dit que nous n'avions pas besoin de lui. Il nous laisse
le distancer lorsqu'il croit voir approcher un policier de la brigade touristique,
et revient dès que la voie semble libre ... Il n'est pas trop content de ce que
nous lui donnons, mais Zohra voulait que nous ne lui donnions rien ; enfin il
nous laisse. Ce sont alors les rabatteurs des marchands de tapis qui entrent
dans la danse, et nous attendent à la sortie des boutiques pour demander une
commission à l'éventuel vendeur. Loi du commerce, des petits services et du
bakchich dans le monde oriental !
Après
avoir visité trois tanneries dont une où le patron nous a dit que la sienne
avait été fondée au 11ème siècle et
appartenait toujours à la même famille (même depuis avec un peu moins de temps, ça doit être très bien !)
source
appartenait toujours à la même famille (même depuis avec un peu moins de temps, ça doit être très bien !)
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